Coacher avec le modèle GROW – de Paul DENIS

Pendant de nombreuses années j’ai fait la promotion du modèle du « manager-coach » en entreprise. Un des outils qui a rencontré le plus de succès est le modèle « GROW » de John Whitmore. Cela tient à sa simplicité apparente, et son nom facile à mémoriser. Il peut être mis en œuvre à différents niveaux de maitrise du coaching, ce qui le rend accessible à un grand nombre. Je propose donc d’en rappeler ici les grandes lignes.

« GROW » pour quoi faire ?

Un jour un collègue est venu dans mon bureau avec cette question : « Paul, je dois animer une réunion à l’Etranger dans trois semaines sur tel projet ; j’ai quelques idées mais je n’y vois pas très clair. Peux-tu m’aider à préparer ? ». Ce collègue savait que j’avais déjà animé des ateliers similaires, mais dans des contextes différents.
Une première option pour moi était d’en apprendre un peu plus sur le contexte et les enjeux, puis de faire part de mon expérience et mes conseils. C’est la démarche de type « poisson », «évoquée dans un article précédent : Rapide – peut-être – mais c’était le renvoyer avec mes idées, quand je ne connaissais moi-même pas le contexte autant que lui, et surtout quand c’était à lui d’animer la réunion, in fine.
J’ai donc opté pour la deuxième option – qui favorise l’appropriation et donc l’action. Je lui ai proposé de réfléchir à son problème en quatre temps.

Un processus en quatre étapes:

Etape 1 : Quel est ton objectif ? Quel est l’objectif de la réunion ? Idéalement, que se passera-t-il à la suite de cette réunion ? Si tu pouvais filmer avec une caméra ce qui se passe après la réunion, ça ressemblerait à quoi ? Que verrait-on les gens faire ?… Je l’ai donc questionné sur la cible, ou le « G », pour « Goal » en Anglais. L’idée était de le faire se projeter dans le futur, avec une vision de la réussite du projet.

Etape 2 : Où en es-tu aujourd’hui – de ta préparation de cette réunion ? Où en est le groupe ? Qu’as-tu déjà fait, essayé ? Qu’est-ce qui a marché, ou pas ? Quels sont les obstacles ou difficultés rencontrés ? Ce faisant, je l’ai ramené à la réalité, ici et maintenant. Ce qui permettait de visualiser l’écart entre la cible et la situation présente. « R » pour « Reality », donc.

Etape 3 : Quelles sont tes options ? Avec qui peux-tu préparer, qui peux-tu impliquer pour renforcer l’adhésion ? Quelles options d’animation ? Par rapport aux difficultés listées, quelles solutions, alternatives ? Je l’ai donc aidé à faire un « remue-méninges » autour des actions possibles. Même si ce n’était pas exhaustif, cette première liste allait lui permettre de se remettre dans l’action, lui redonner confiance, ouvrir des pistes encore inexplorées. « O » comme options, bien sûr.

Etape 4 : Maintenant que tu as identifié toutes ces pistes, que vas-tu faire ? Lesquelles veux-tu mettre en œuvre ? Quand, Comment ? Avec qui ? Il ne s’agit pas de tout mettre en place à l’issue de l’exercice, mais plutôt de choisir les actions qui paraissent, à ce moment-là, le plus pertinentes. C’est à une forme d’engagement que je l’invitais à ce moment-là. John Whitmore parle aussi de « responsabilité », qui suit la « prise de conscience ». Le « W » vient de « will » (vouloir), que d’autres ont plus tard rebaptisé en « way forward » (la route à suivre).

G, R, O, W, « GROW » donc, forme ce bel acronyme qui nous parle de développement, de croissance.

Une des clés du modèle : Les questions ouvertes

GROW est un modèle de coaching : Il a pour principe d’aller à la recherche des ressources de la personne qui demande une aide. Logiquement, pour ne pas induire ses propres schémas et laisser le plus possible de place à l’autre, mes questions seront ouvertes, n’induiront pas ma pensée : J’éviterai « Est-ce que tu penses que… », qui appelle un « oui » ou un « non ». Je favoriserai : « Que vois-tu… ? A quoi ressemblera… ? Comment… ? Quelles sont les options… ? », etc.

GROW le temps d’un café

Le processus tel que décrit ci-dessus a pu vous paraître long. En fait, il peut dans certains cas se dérouler devant la machine à café, en 5 à 10 minutes seulement – selon la complexité du sujet, bien sûr.
Par exemple : « J’ai reçu une nouvelle demande de travaux ce matin. C’est important mais je suis déjà très chargé. Je ne sais pas quoi répondre à mon interlocuteur ». Aider la personne à prendre du recul avec GROW peut être à la fois rapide et très aidant.
A contrario, on peut aussi dérouler le processus sur plusieurs séances de travail, par exemple une séance par étape du modèle. Ce sera plus le choix de personnes en position d’accompagnement (les coaches notamment) que des managers.

Linéaire, dans une certaine limite

Sur des problématiques simples, le déroulement des quatre étapes peut se faire l’une après l’autre, dans l’ordre des quatre lettres. Mais il se peut aussi qu’il faille du temps à la personne pour clarifier la situation, et que du coup des aller-retours soient utiles entre la réalité et l’objectif, ou entre les actions proposées et l’objectif – est-ce cohérent ?

Chemin vers une nouvelle posture

Quand il commence à l’utiliser, un manager le fera souvent comme on utilise un outil en suivant le mode d’emploi, de façon mécanique. Avec le temps, il comprendra qu’il s’agit d’un guide pour le mettre dans une posture : Celle du jardinier, celle de celui qui se met au service de la personne pour qu’elle puisse progresser, se renforcer.
A mon sens, le modèle GROW, aussi simple qu’il puisse paraître, apporte au manager, en même temps que des solutions aux problèmes qui lui sont soumis, un vrai chemin vers la posture du manager-coach.

(1) Whitmore (John), Le guide du coaching, Maxima, 2012

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